Pourquoi remettre à demain ce qu’on peut faire aujourd’hui quand on sait qu’il faudra bien s’y mettre un jour ou l’autre ? Avant de répondre à cette question, écoutons ce qu’en disent Laurent et Lyse, deux collègues travaillant dans une entreprise manufacturière. 

Laurent : « Ce sont les conversations désagréables que je reporte le plus au lendemain. S’il faut que j’annonce à un client que sa commande sera en retard ou s’il faut que je dise à un collègue qu’il me tombe sur les nerfs, j’hésite, puis je me dis que je le ferai demain. Et c’est encore plus difficile le lendemain ! » 

Lyse : « Je reporte les tâches qui me mettent mal à l’aise. Je sais que mon orthographe est horrible. J’attends donc à la dernière minute avant de composer un texte. Le pire, c’est qu’en agissant de cette manière, je n’ai souvent pas le temps de me corriger. » 

Laurent et Lyse mettent le doigt sur deux causes fréquentes de procrastination : les tâches désagréables et la crainte de l’échec. Mais il y en a d’autres. Faisons-en un bref survol en nous demandant comment nous pouvons vaincre ce chronophage interne. 

1. La peur de l’échec 

Il est normal que vous agissiez comme le fait Lyse si vous ne vous sentez pas à la hauteur et que vous vous attendez à un échec avant même de commencer une tâche. Mais, si vous êtes incompétent ou ne vous croyez pas à la hauteur, pourquoi ne pas demander à un collègue d’évaluer franchement vos compétences ? Ensuite, si vous avez vraiment des lacunes, allez chercher la formation qui vous rendra votre confiance personnelle. En remettant au lendemain au lieu d’attaquer le problème, vous vous forgez lente-ment une réputation d’incompétence. 

2. Le perfectionnisme 

Vous livrerez immanquablement vos rapports en retard si vous attendez qu’ils soient parfaits. Cette cause de procrastination est tellement fréquente que nous lui consacrons la prochaine section de ce chapitre. 

3. La fuite 

Laurent préfère fuir les activités déplaisantes plutôt que de s’y attaquer. Il traîne alors avec lui l’anxiété découlant du fait qu’il sait qu’il devra tôt ou tard accomplir la tâche. Il empire sa situation parce que ses clients et ses collègues lui en voudront de ne pas les avoir mis au parfum plus tôt. 

S’il vous arrive de préférer la fuite à l’affrontement, songez à déléguer la tâche désagréable ou faites-la immédiatement. Dans les deux cas, vous en sortirez soulagé. 

4. La pensée magique 

D’autres tentent d’ignorer la tâche à accomplir en espérant qu’avec le temps, elle ne sera plus nécessaire. Dans certains rares cas, cela fonctionne, mais la plupart du temps, cette tactique a des répercussions néfastes. 

• Un collègue fera le travail à votre place, mais il nourrira ensuite du ressentiment à votre égard. 

• Le besoin disparaîtra parce que le client choisira de faire affaire ailleurs ou que la rencontre aura lieu sans l’ordre du jour que vous deviez préparer. 

Ne succombez pas à la pensée magique. Elle pourrait faire disparaître votre emploi. 

5. La sous-estimation du temps nécessaire 

Deux choses risquent de se produire si vous sous-estimez le temps nécessaire à l’accomplissement d’une tâche. Vous attendrez à la dernière minute pour entreprendre le travail (vous condamnant au retard par le fait même) ou vous vous retrouverez submergé de mandats que vous aurez acceptés avec la certitude d’être en mesure de les mener à terme. Dans les deux cas, vous nuisez à votre carrière. 

Révisez les mandats que vous avez réalisés par le passé et évaluez le temps qu’ils vous ont réellement demandé. Prenez ensuite l’habitude de baser vos estimations sur ces faits plutôt que sur votre infatigable optimisme. 

6. L’attente de l’inspiration 

À un journaliste qui lui demandait comment il faisait pour trouver l’inspiration nécessaire à l’écriture d’autant de livres, le romancier Tom Clancy répondait : « N’attends pas l’inspiration. Écris-le, le maudit livre ! » (Don’t wait for inspiration. Just write the damn book 

L’inspiration est une pompe à eau manuelle. Il faut l’amorcer pour qu’elle fonctionne. Lancez-vous dans le mandat et l’inspiration suivra. 

7. La peur du succès 

Ce facteur est plus rare, mais on le retrouve tout de même : certaines personnes craignent de réussir parce qu’elles se sous-estiment et redoutent qu’une réussite augmente les attentes des autres à leur égard. Elles préfèrent donc échouer afin de ne pas connaître cette angoisse. Elles sabotent leur carrière pour éviter les promotions et les responsabilités. 

Si c’est votre cas, lisez La gestion des conflits pour les pissous, un autre guide du même auteur, en vous attardant surtout aux chapitres qui parlent d’estime de soi. 

8. Le sentiment d’impuissance 

Certains se font des montagnes avec des riens et surestiment ce que l’on attend d’eux. Ils se disent qu’ils ne seront jamais capables d’abattre autant de travail. Le pire, c’est qu’ils ont raison : si vous pensez que vous n’y arriverez pas, votre crainte se réalisera d’elle-même. 

Que faire pour combattre ce sentiment d’impuissance ? Commencez par diviser la tâche à accomplir. Il vous semblera alors moins impossible de réussir. Si cela ne fonctionne toujours pas, demandez de l’aide pour la première étape (ou une activité de formation) et, si c’est encore insuffisant, retirez-vous du dossier ! Rappelez-vous que le sentiment d’impuissance est souvent le résultat de limitations que l’on s’impose soi-même et qui ne correspondent à rien de vraiment réel. 

Que se passe-t-il quand une personne succombe à la procrastination, mais sans vouloir se l’avouer ? Selon Rita Emmett, auteure de Ces gens qui remettent tout à demain, cette personne se comporte comme l’un des cinq personnages suivants : 

• Un voyageur qui se rappelle soudain, au moment de commencer, qu’il aimerait un bon café, celui qu’on trouve dans ce petit bistrot de l’autre côté de la rue. 

• Un adepte de la socialisation qui part à la recherche de collègues pour raconter sa fin de semaine ou leur demander si le bébé fait finalement ses nuits. Tous les prétextes sont bons quand on souhaite éviter un travail. 

• Un préparateur modèle, un de ces spécialistes de la préparation (et non de l’exécution) du travail : il taille son crayon, accumule l’information, cherche sur Internet… Mais il ne commence pas le travail. 

• Un spécialiste du rangement qui décide subitement de faire le ménage au lieu de se lancer dans la tâche. 

• Un bon samaritain toujours prêt à rendre service (personnage dont nous reparlerons d’ici la fin de ce chapitre). 

Vous êtes-vous reconnu dans l’une (ou plusieurs) de ces descriptions ? Si oui, vous êtes un adepte de la procrastination. Relisez la section précédente. Identifiez la cause cachée de ces habitudes et attaquez-vous-y. Restez également à l’affût des mauvaises habitudes qui vous font perdre votre temps au travail et qui peuvent cacher de la procrastination : abus de jeux vidéo ou d’Internet, participation à des réunions sans intérêt ou longues discussions téléphoniques. 

Finalement, n’acceptez jamais un mandat avant d’avoir bien compris ce qu’on attend de vous. Si vous n’avez pas bien compris, vous ne saurez pas par où commencer et il est possible que vous soyez trop gêné pour aller demander des éclaircissements. La prochaine fois, au lieu de dire « hum, hum… », assurez-vous d’avoir bien compris.